Hypertension artérielle secondaire

Dr. Philippe Musso
Cardiologie

Il n’est plus à démontrer que l’hypertension artérielle essentielle ou primaire est un facteur de risque cardiovasculaire indépendant avec un mauvais pronostic sur le long terme si elle reste mal contrôlée. 

Cependant qu’en est-il de l’HTA secondaire? Serait-il important de la rechercher si de toutes façon le patient sera traité pour une HTA primaire?

Souvent sous-estimé, les nouvelles études épidémiologiques montrent une prévalence d’HTA secondaire pouvant atteindre jusqu’à 10% des patients hypertendus vus dans nos consultations. Les causes fréquentes sont l’hyperaldostéronisme primaire, la sténose artérielle rénale, et le syndrome d’apnée du sommeil. L’hypercortisisme, l’hyperthyroïdie, le phéochromocytome, l’hyperparathyroïdie et la coarctation de l’aorte sont plus rares mais à rechercher également. Le travail en binôme du médecin traitant et du cardiologue peuvent se montrer primordiale à la rechercher d’HTA secondaire, travail pouvant s’effectuer en ambulatoire déjà en amont avant de référer le patient éventuellement dans un centre universitaire.

Après avoir confirmé l’HTA avec des auto mesures au domicile, ou un examen de la tension artérielle sur 24h (MAPA), l’élimination systématique d’une HTA secondaire est recommandé. Afin de lancer un bilan spécifique, il faut s’enquérir de rechercher les signaux d’alertes suivants:

  1. HTA de début précoce (<40 ans)
  2. Hypokaliémie au bilan initiale (kaliémie <3.6mmol/l)
  3. HTA résistante
  4. HTA d’emblée sévère
  5. HTA avec atteinte sévère d’organes (cœur, rein, yeux, cerveau) 
  6. HTA avec incidentalome surrénalien

Le bilan classique à la recherche d’une HTA secondaire se compose à la fois d’imagerie et de biologie.

Imagerie:

  1. Echocardiographie : recherche d’hypertrophie ventriculaire gauche, et exclusion d’une coarcation de l’aorte.
  2. Duplex rénal afin d’exclure une sténose d’une artère rénale (surtout chez la personne âgée), et/ou angio IRM si suspicion d’une dysplasie fibromusculaire.
  3. CT ou IRM abdominale à la recherche d’un adénome surrénalien.

Biologie:

  1. Dosage de l’aldostérone et rénine dans des conditions standardisées à la recherche d’un hyperaldostéronisme primaire. En pratique, les traitements par Sartans ou IEC doivent être stoppé 2 semaines avant, et inhibiteurs aux minéralcorticoïdes en tout cas 3 semaines.
  2. Mesure des métanéphrines plasmatiques et urinaires à la recherche d’un phéochromocytome. 
  3. Test de freinage minute à la dexaméthasone dans le cadre d’un hypercorticisme. 
  4. Egalement TSH, PTH.

La découverte d’une HTA secondaire apporte une vraie plus-value au pronostic du patient, notamment dans le cadre d’un hyperaldostéronisme primaire unilatérale ou d’une sténose artérielle rénale relevante pour lesquels un traitement peut être curatif. A titre d’exemple, avec une même pression, un patient avec un hyperaldostéronisme primaire aura plus de complications cardiovasculaire qu’un patient avec une HTA primaire 

En résumé, le travail combiné de l’interniste et du cardiologue permet d’effectuer le diagnostic des causes de l’HTA et d’améliorer son pronostic. Les situations d’HTA secondaires sont plus fréquentes qu’il n’y paraît et le défi réside à bien sélectionner les patients qui auront besoin d’un bilan complémentaire.

 

Référence:

2024 ESC Guidelines for the management of elevated blood pressure and hypertension

L’HTA secondaire : un “must-have” diagnosis pour les cardiologues - Réalités Cardiologiques

Newsletter